Une technologie du début du siècle encore utilisée aux chutes de la Chaudière
Depuis plus de 100 ans, le barrage-voûte constitue un élément essentiel des activités de production d’hydroélectricité aux chutes de la Chaudière. Cet ouvrage construit entre 1907 et 1909 a été mis en service en 1910. Depuis 109 ans, il régule le débit d’eau de la rivière des Outaouais et stabilise le niveau d’eau en amont entre Ottawa et Arnprior.
Tout au long des années 1800, avant la construction du barrage-voûte, les propriétaires de différentes entreprises établies sur les rives et dans les îles autour des chutes aménagent plusieurs digues et petits barrages. Ces petits ouvrages leur permettent d’acheminer l’eau vers leurs équipements et leurs turbines, surtout en automne et en hiver, alors que le courant est beaucoup plus faible qu’au printemps. Bien entendu, ces ouvrages sont à l’origine de nombreux différends entre leurs utilisateurs. Avec l’avènement de l’électricité, la concurrence devient encore plus féroce. En 1905, des propriétaires et des locataires unissent leurs efforts pour construire un barrage unique au bénéfice de tous. Puis, en 1907, les gouvernements de l’Ontario et du Québec concluent une entente en vertu de laquelle ils se partagent en parts égales les droits du potentiel hydroélectrique du barrage de la Chaudière, la production d’électricité de l’ouvrage ainsi que son coût, son entretien et son exploitation. Le barrage-voûte de la Chaudière devient ainsi la première installation hydroélectrique sur la rivière des Outaouais. Comme la filière hydroélectrique représente aujourd’hui 61 % de la production d’électricité au Canada, la rivière des Outaouais et le barrage-voûte aux chutes de la Chaudière occupent une place prépondérante dans l’histoire. La rivière des Outaouais est l’une des trois rivières qui jouent un rôle crucial à l’échelle nationale dans les premiers stades du développement de l’hydroélectricité au Canada.
Comme nous l’avons mentionné, l’entente initiale de 1907 prévoyait le partage entre l’Ontario et le Québec non seulement des droits relatifs à l’eau, mais aussi de l’entretien et de l’exploitation du barrage. Ainsi, au moment de sa mise en service, les deux gouvernements ont des opérateurs chargés de surveiller l’ouvrage. Tout d’abord répartie également entre les deux provinces, la participation fluctue au fil des ans, au gré des diverses ventes et acquisitions. En 2016, alors qu’elle détient une participation de 67 % dans le barrage-voûte, Hydro Ottawa annonce qu’elle a conclu avec Hydro-Québec un contrat d’achat et de vente portant sur la participation restante de 33 % dans le barrage-voûte. Cet ouvrage sert à réguler le débit d’eau et non pas à créer un réservoir. La quantité d’eau qui se déverse par-dessus les billots est dictée par le débit de la rivière. Elle est nulle en période d’étiage, mais peut atteindre 5 500 mètres cubes par seconde au printemps. Comme il s’agit d’un ouvrage régulateur, qui ne retient pas l’eau, la construction du barrage-voûte n’a guère modifié la rive des lacs en amont.
D’une longueur de 400 mètres, le barrage forme entre deux des centrales hydroélectriques un arc dont la forme rappelle celle des chutes. Les premiers explorateurs français ont donné aux chutes le nom de « Chaudière », qui signifiait « bouilloire » en ancien français et était une traduction de leur nom en langue anishinaabe, soit « asticou ». Le barrage-voûte comporte 50 ouvertures munies de rainures retenant de gros billots équarris. Pour stabiliser autant que possible le niveau d’eau en amont, les opérateurs posent ou enlèvent des billots dans ces ouvertures en utilisant trois treuils électriques placés sur la dalle supérieure. Cette méthode est utilisée depuis la mise en service de l’ouvrage en 1910. Le barrage-voûte est sous surveillance constante et doté en personnel en tout temps depuis le début, ce qui représente près de 94 000 heures d’exploitation continue! Pour des raisons de sécurité, le public n’a pas accès à l’ouvrage. Toutefois, le nouveau parc aménagé aux chutes de la Chaudière permet à tous d’observer la beauté et la puissance de la rivière des Outaouais lorsque ses eaux traversent ce barrage-voûte historique.